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Arrêt KERVIEL : quand la victime est jugée responsable...

La décision de la Cour d'appel de Versailles, après un réquisitoire d'absolution civile pour Kerviel et d'inversion de la charge du préjudice au détriment de la Société générale, très largement suivi par l'arrêt, soulève quand même certaines questions juridiques et risque de susciter une grande incompréhension chez nos concitoyens -pour ceux, du moins, qui ne se sont pas laissé intoxiquer par les campagnes médiatiques de M. KERVEL et de son avocat.

 

Si la banque, en effet, comme il est jugé, a pu faire preuve de négligence (et, peut-être pas complètement désintéressée : la spéculation est une drogue dure...), on renverse complètement les rôles -et, on se demande comment on peut encore condamner Kerviel à une peine aussi lourde par rapport à la pratique en matière financière : car, l'arrêt revient à le tenir pour responable de seulement 1/5000 du préjudice total, soit 0,0002% -ce qui est infinitésimal et implique que la banque est responsable, elle, du préjudice causé par son employé indélicat pour 4 999/5000, soit, 99,9998% ! On eût sans doute mieux compris, par exemple, un partage moitié-moitié, selon le principe de "l'équivalence des conditions", mais tenir pour responsable à près de 100% de son dommage l'institution qui aurait seulement créé un environnement favorable aux malversations d'un tricheur risque d'être perçu, par ceux qui se donneront la peine d'y réfléchir un tant soit peu, comme un défi à la morale et au droit : dans la même logique, on pourrait, en effet, se demander, dès lors, s'il ne faut pas désormais n'indemniser qu'à 0,0002% le propriétaire d'une maison qui n'a pas transformé celle-ci en Fort Knox pour empêcher qu'un voleur puisse y pénétrer, ou, le supermarché qui laisse ses produits à la libre appréhension du public, créant ainsi les conditions de sa vulnérabilité aux larcins... Certains peuvent penser que c'est le monde à l'envers : car c'est quand même bien le voleur ou le tricheur qui est la cause première du dommage causé par son infraction, même si on a pu avoir le tort de lui faciliter les choses ou de ne pas les lui compliquer suffisamment ! La différence entre les voyous et les honnêtes gens, c'est tout de même bien que ces derniers, eux, ne profitent pas des occasions qui leur sont données de violer la loi... 

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