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Les victimes moins bien traitées que les délinquants

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Ci-joint l'intégralité de mon interview sur le dernier numéro de Valeurs actuelles, page 34...

Comment réagissez-vous à ce tragique dernier fait-divers, où un policier est entre la vie et la mort, victime d’un détenu condamné à une longue peine ayant bénéficié d’une permission de sortie ?

Cette affaire est tristement emblématique. Ce détenu, condamné à 27 reprises, était fiché « S », et n’était libérable qu’en 2018, or cette permission de sortir lui a été accordée début 2015 et il en a profité pour s’échapper et abattre un policier. Croire que cela n'est que de la responsabilité d'un juge qui se serait trompé serait une erreur. C'est plus grave car c'est l'une des illustrations de la dérive idéologique d' un systéme .
Pour faire simple, on ne dit plus aux délinquants : « vous avez transgressé la loi, expression des valeurs fondamentales de la société, vous serez sanctionnés" on leur dit : « on va vous encadrer, vous soigner, vous aider à revenir dans le droit chemin ». l'aspect punition a disparu au profit d'un traitement médico-social de la délinquance parfaitement connu, surtout de la part des récidivistes qui, par définition, ont l'habitude de revenir...Cette évolution néfaste ne date pas d'aujourd'hui mais elle atteint, depuis 2012, une ampleur inégalée car elle est dans l'essence même du discours socialiste, relayé par le syndicat de la magistrature.

Un délinquant n’est plus considéré comme un délinquant ?

le système mis en place tourne autour de l'idée que l'acte délictuel est d’abord la manifestation d’un « mal-être ». C’est ce même postulat rousseauiste de la « société qui corrompt" qui fait du délinquant une victime de la société. Par contre, la victime, la vraie, celle qui subit l'infraction, n'est pas au même niveau de prise en compte et l'attention qu'on lui porte dans le procès est bien moindre.
Autre postulat de base: « la prison est l’école du crime, donc il faut supprimer la prison ».Toutes les directives de Mme Taubira visent à éviter l'emprisonnement et même si, bien sûr, la solution ne réside pas que dans l'emprisonnement, l'aspect protection sociale destiné à mettre hors circuit les plus dangereux, les récidivistes, est absent de la peine. De plus, entre la peine prononcée et la peine réellement exécutée, il y a un abîme! Si les gens savaient que, même condamné à 18 mois d'emprisonnement "ferme", il est possible de ne pas faire un jour de prison...
Aprés le jugement, tout un autre système se met en place, celui de l'innaplication des peines: entre les aménagements, les réductions automatiques et supplémentaires, les libérations conditionnelles, les bracelets électroniques et les...inexécutions de peines, le délinquant, qui a un discours et une conduite adaptés, une certaine habitude, traverse sans grand mal cette " incarcération".

L’explosion sans précédent de la délinquance est-elle une conséquence de ce laxisme ?

Sachant parfaitement combien l’esprit, le temps et le parcours judiciaires leur sont favorables, beaucoup de délinquants, notamment les récidivistes, font le choix de la délinquance. C'est un calcul risque-profit où les notions du bien et du mal sont totalement absentes. Le discours abolitionniste de la prison est entendu 5/5 par eux! Les forces de l'ordre font leur travail au mieux dans des conditions misérables comme l'ensemble des personnels de Justice, sans aucune reconnaissance.
Mais la problématique n'est pas que technique ou matérielle, elle est avant tout politique. Le courage d'affronter les réalités d'une société qui se délite, d'une délinquance qui explose, n'est pas l'apanage des politiques.
Un ministre de la Justice ne fait jamais une carrière politique après son passage Place Vendôme. Il faut dire que trés rares sont ceux qui connaissent vraiment le terrain et le monde judiciaire.
L'incompréhension entre le peuple et sa justice est à son comble tout comme celle entre justice et police alors qu'il devrait y avoir une continuité, une complémentarité. La " chaîne pénale " est rompue et rien ne changera tant que le systéme reposera sur de tels postulats que personne n'osera combattre sans langue de bois.
Face au constat d'une envolée de la délinquance, malgré les sérieuses alertes données dont celle du juge Trevidic lançant un appel " au feu!" en dénonçant les menaces terroristes à grande échelle sur le territoire, nos gouvernants sont figés, vitrifiés, se déplaçant au gré des drames en ressassant des discours convenus.
Retrouver une cohérence d'ensemble avec du bon sens, être dans l'action, dans la reconnaissance de ceux qui se battent contre cette délinquance, protéger les victimes et la société, simplifier les procédures, telles sont les premières pistes à suivre, et vite!

Jean-Paul Garraud
Président de l'association professionnelle des magistrats, ancien Député de la Gironde

 

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